Reconnaître les métiers du spa à leur juste valeur et faire évoluer les équipes !

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Reconnaître les métiers du spa à leur juste valeur et faire évoluer les équipes !

Ce qu’en disent Catherine Sertin et Laurent Durant, et les Ecoles Silvya Terrade.

 

Fin d’année scolaire rime avec choix d’orientation. Chez Spa-A, il nous paraissait important de revenir à la passion du métier et au professionnalisme exigé.

C’est que, depuis quelques mois, le spa est malmené et mal-aimé… Nous peinons tous à recruter, et nous pouvons nous interroger pour savoir si le spa fait toujours rêver … Jamais le client n’a eu autant besoin d’évasion et, effet COVID peut-être, il est de plus en plus exigeant sur ce qui est proposé.

Comme pour la restauration, des efforts ont été faits mais la rémunération ou les conditions de travail ne sont cependant pas toujours au rendez-vous, et les candidatures se font plus rares.

Nous avons voulu comprendre la situation et qui mieux que Catherine SERTIN et Laurent DURANT pour répondre à nos interrogations ?

 

Catherine, que se passe-t-il ? Sommes-nous face à une crise des vocations ?

Le monde du travail évolue, les statuts de « salarié » à « indépendant » se multiplient, le rêve d’une carrière linéaire s’effrite et le CDI dans un grand groupe hôtelier n’est plus la voie royale.

Comme beaucoup de métiers en tension, le monde du spa ne fait plus rêver. Les candidats se contactent sur les réseaux sociaux, parlent de leurs difficultés au quotidien : horaires, surcharges de travail, conditions physiques pour une rémunération qui ne correspond pas au travail effectué et ne permet pas de faire face aux réalités économiques actuelles et au coût de la vie … Le métier traverse une crise, qui pousse même certains à la démission.

Peinez-vous à recruter des élèves ?

Oui le recrutement est plus compliqué au niveau des apprenants. Nous avons effectivement moins de demande en formation spa et une désertion totale pour le spa saisonnier, qui est pourtant un bon tremplin pour accéder à l’hôtellerie de luxe.

 

Est-ce que les élèves abandonnent en cours de route, de cycle, ou au moment de se lancer dans la vie active ?

Quelques abandons mais pas plus qu’avant. On peut noter que les candidats passionnés par le massage restent. C’est un métier physique qui peut ne pas correspondre à tout le monde. Laurent aime le comparer à un sportif de haut niveau qui doit avoir condition physique et mentale pour réussir.

 

Quelle évolution ? Plutôt un phénomène de reconversion ?

En 2022, de nombreux secteurs sont touchés par la pénurie de candidats. Pour quiconque s’intéresse au monde du spa, c’est une véritable opportunité de décrocher un poste et de donner un élan à sa carrière.

 

Qui sont les plus motivés ?

Les passionnés du massage

 

Quels arguments pour les convaincre de rejoindre nos métiers ? Comment les garder ?

Se créer une image de marque employeur et une stratégie de « Sourcing » des candidats.
Il faut distinguer les compétences indispensables des compétences « souhaitées ». Sans cela, on risque de chercher un mouton à 5 pattes… sans jamais le trouver. Commencer par créer des fiches de poste et réfléchir à la valeur de son entreprise en tant qu’employeur. Identifiez ce que l’on souhaite apporter à ses collaborateurs. En plus d’une rémunération juste, il faut réfléchir aux avantages proposés, aux opportunités de formation et de développement des compétences, à la mise en place d’une ambiance de travail sain et agréable…

La « marque employeur » peut faire la différence et si elle est invisible ou qu’elle donne une perception négative aux professionnels, le travail de recrutement sera improductif. 90 % des professionnels cherchent au moins une ressource pour évaluer la réputation employeur d’une entreprise avant de postuler.

Une fois recruté il faut garder son personnel en donnant du sens à ce que l’on fait, travailler sur des process type parcours client, organiser des réunions d’équipe pour les impliquer dans la vie du spa, des challenges et un accompagnement pour les faire monter en compétences. Il faut sans cesse se renouveler. Aujourd’hui il y a un vrai besoin en formation tout au long de sa carrière, besoin de diversité dans les tâches. Ne pas oublier que pouvoir conjuguer vie privée et vie professionnelle reste une priorité surtout par rapport à des aménagements horaires. La difficulté des entreprises est très complexe quant il faut conjuguer tous ces impératifs : la satisfaction client,  la rentabilité des espaces et la fidélisation des équipes avec la gestion au quotidien d’activités chronophages.

 

Comment rendre désirables les métiers du bien-être alors que le client est en demande ?

Le développement des compétences de son équipe est une mission essentielle pour un manager, un investissement important qui lui impose un changement radical de posture. Pour faire évoluer ses équipes, il doit devenir un « manager – coach », un leader positif animé par une véritable culture de l’accompagnement. Exit le manager obnubilé par les objectifs opérationnels qui contrôle, recadre, sanctionne ! Aujourd’hui, le manager – leader accompagne, explique, transmet, soutient et motive ses collaborateurs. Au même titre qu’un client satisfait vous rapporte d’autres clients, un salarié satisfait valorisé dans son parcours sera un atout pour recruter d’autres praticiens. La e-réputation existe aussi dans le recrutement. Mettre en place des process qui permettront d’avoir des exigences sans pour autant faire de blessures d’orgueil mais au contraire inciter les membres d‘équipe à se surpasser. Comment donner du bien-être aux autres si on n’est pas en harmonie avec soi-même ? C’est dans ce sens que nous formons dans nos écoles la nouvelle génération selon les 3 axes du référentiel du CQP Spa Manager (Satisfaction Clientèle, Animation du spa et rentabilité, Recrutement et management des équipes).Nous les formons aussi à la posturologie et il faut aussi diversifier les soins pour éviter les arrêts maladie, éviter les tendinites et donc le turnover. Laisser les 15 mn indispensables pour la pris en charge et le conseil. La vente et le rebooking doivent aussi rester une priorité.

 

Que diriez-vous des personnes qui se reconvertissent vers le spa ?

Le spa regorge d’offres d’emploi avec des possibilités de réussir et d’évoluer, d’aller travailler et de se former à l’étranger, de travailler dans des groupes et de pouvoir associer des expériences dans d’autres pays …

Beaucoup veulent être « auto-entrepreneur » pour avoir une certaine autonomie sans se rendre compte des réalités économiques.
Beaucoup de Responsables d’instituts ou de spas nous disent que nous pouvons former sur le Savoir-Faire, mais que le Savoir-Etre est bien souvent le point faible. Que leur répondre ? En effet le savoir-être fait partie des principales qualités que recherchent les recruteurs et en arrivant dans nos écoles, nos élèves n’ont pas forcément encore acquis tous les codes de la profession et découvrent pour certains l’univers du spa, du luxe et de l’hôtellerie.

Le savoir-être est essentiel, il est notre priorité dans nos écoles, il demande beaucoup de rigueur, de patience sans oublier l’exemplarité au quotidien.

Tout d’abord travailler dans le domaine de la beauté exige de l’humilité. Il faut apprendre à rester simple et discret, il s’agit de laisser sa place au client et de le valoriser. Ce positionnement, est inculqué par nos enseignants en intégrant l’humain, la simplicité et la passion qui sont au cœur de notre pédagogie. L’univers du luxe exige aussi beaucoup de rigueur. A cette rigueur s’ajoute le sens du contact et du service, des qualités très appréciées des recruteurs qui font écho à l’humilité exigée.

Nous commençons par différents ateliers coaching pour la recherche d’entreprises (tenues vestimentaires, savoir se présenter en entreprise, développer son esprit de curiosité). C’est ensuite au travers de mise en scène de l’expérience client et de la disponibilité de l’équipe pédagogique que nous constatons l’évolution progressive de nos apprenants.

Nous allons chercher à développer les qualités liées au savoir-être : l’autonomie, l’organisation, la communication verbale et non verbale, l’écoute, la ponctualité, l’esprit d’équipe, l’adaptabilité… mais l’école ne suffit pas ! L’environnement professionnel et personnel associés à de la volonté seront les garants d’une réussite scolaire et d’une intégration professionnelle.

La formation en alternance ainsi que l’intervention de professionnels partageant leur expertise renforcent notre action de formation.

 

Comment s’adapter à ces comportements ? Comment les lycées professionnels et le Pôle Emploi pourraient mieux répondre à nos exigences (en matière d’éducation notamment) ?

Nous avons besoin dans nos écoles de jurys professionnels.  Il est important de savoir prendre du temps pour montrer l’exemple aux plus jeunes, partager sa passion mais malheureusement les spa managers n’ont pas toujours la possibilité de se libérer pour déclencher des vocations.

 

En rencontrant les étudiants dans différentes écoles, je me rends compte qu’ils ont tous les derniers modèles de téléphone, mais que bien souvent, ils n’ont jamais mis les pieds dans un spa, ils hésitent à visiter les établissements de luxe. Je leur recommande souvent de se faire offrir, pour Noël par exemple, une expérience ou d’apprendre à oser prendre contact avec les responsables de ces établissements qui, s’ils expliquent leur démarche seront les premiers à leur ouvrir les portes. Qu’en pensez-vous ?

Oui, il est essentiel d’avoir été au moins une fois client en spa pour comprendre ce que recherche le client. Ils n’ont pas tous les moyens de s’offrir un soin mais nous les incitons … Le stage est aussi un bon moyen de faire découvrir le métier ou la formation par la voie de l’alternance. Certaines entreprise hésitent encore à y recourir mais c’est un bon moyen de former son personnel et de le fidéliser…

 

Peut-être faudrait-il des « égéries » du monde du spa pour leur donner envie, des influenceuses qui leur montreraient la passion et l’évolution des métiers du bien-être ? Les séduire à travers leurs codes.

La restauration utilise ce principe et ils ont pourtant les mêmes problématiques de recrutement. La revalorisation des salaires reste une priorité mais l’équation économique n’est pas simple pour générer une rentabilité…

 

Quels retours avez-vous des anciens élèves, qui ont évolué dans les spas ?

Ceux qui sont restés dans le domaine sont passionnés, ont bien évolué et ont pris des responsabilités : Spa Manager, Responsable accueil, Formatrices de marque, Création d’entreprise, Auto-entrepreneur…

 

Quelles sont les raisons pour lesquelles ils/elles quittent notre univers ?

Ce qui revient le plus dans leur questionnement : les horaires et la rémunération. En terme de positionnement, le manque de considération !

 

Est-ce à dire qu’il faudrait repenser toute la filière ? Les grands établissements hôteliers recherchent le « couteau suisse » qui aura assez d’autonomie et d’expérience pour diriger le spa et manager les équipes et les KPIs de l’unité, le talent pour créer une expérience différente et aussi la souplesse pour passer en cabine si besoin, tout en s’exprimant dans un anglais parfaitement courant (sont d’ailleurs parfois prêts à faire l’impasse sur ce dernier point pour trouver la perle…).

Nb : Beaucoup de Spas Managers ou Spas Directeurs nous disent exercer ce métier par amour mais regrettent que la rémunération et l’évolution ne soient pas au rendez-vous. Certains osent des solutions plus « disruptives » ou « innovantes »… Spa-A abordera cette thématique lors du salon EQUIP HOTEL, lors d’une table ronde organisée par SENSE OF WELLNESS (Isabelle CHARRIER).

 

——
Donner envie aux jeunes talents de rejoindre le monde du spa et du bien-être, c’est aussi la vocation de Spa-A. Au niveau de l’association, nous devons réfléchir à un programme plus adapté pour eux, networking adapté et fun …

——

 

Salomé Durey, élève à l’Ecole Catherine Sertin, filière Spa Manager, a choisi de s’impliquer bénévolement au sein de notre association, et c’est bien une exception !

 

Salomé, qu’est-ce qui t’a donné envie de rejoindre Spa-A ?

Au sein de l’École Catherine Sertin, nous avons bénéficié d’une intervention très stimulante de Marie-Paule Leblanc-Peru, présidente de la fédération Spa-A. C’est alors tout naturellement que j’ai fait part de mon souhait de m’investir au sein de l’association. Cela m’a semblé constituer une opportunité formidable de participer, à mon échelle bien sûr, à cette initiative qui contribue à valoriser les métiers du bien-être et à promouvoir l’excellence de ma filière de formation.

 

Qu’est-ce que t’a apporté Spa-A ?

Avant tout, je tiens à souligner que l’équipe de Spa-A m’a réservé un accueil très chaleureux. Je me suis sentie impliquée dès les premiers échanges. Marie-Paule anime avec dynamisme et expertise cette association. Spa-A favorise, à mes yeux, les échanges et les rencontres. Pour moi, l’implication au sein de l’association est une occasion unique de donner encore plus de sens à ma formation. En tant que membre Spa-A, je ressens déjà un sentiment d’appartenance à un réseau de professionnels expérimentés à la recherche de l’excellence et de l’innovation en faveur des métiers du spa. C’est une source de stimulation et d’ambition pour moi.

 

Pourquoi, d’après toi, les autres étudiants qui sont dans ta filière n’ont pas sauté le pas ?

Il est difficile de répondre à cette question… Plusieurs raisons me semblent possibles. D’abord, il n’est pas forcément aisé de se sentir légitime à devenir membre d’une association alors que l’on est encore en formation. Je me sens d’ailleurs moi-même toute « petite » parfois quand je réalise à quel point les membres de Spa-A sont des professionnels éminents. Et puis, lorsque l’on est encore en formation, notre emploi du temps est très chargé par les études. Il est souvent compliqué de dégager du temps. Mais je crois que l’on peut considérer que ce temps fait pleinement partie de la formation dans la mesure où cela permet d’élargir son horizon et de mieux se projeter dans l’avenir.

 

 

Propos recueillis par Marie-Paule Leblanc-Peru Présidente bénévole Spa-A;

 

Marie_Paule Leblanc_Péru

Un parcours de plus de 35 ans à la direction internationale de produits cosmétiques et hôtellerie, dans le développement commercial et marketing. Shiseido, Yves Saint-Laurent, Dior, Thierry Mugler, Clarins, Pure Altitude et le groupe SIBUET ont marqué mon appétence pour le luxe et l'authenticité, en France comme à l'international. Executive Coach formé HEC, pour mettre l'humain au coeur des métiers. Désormais dans la transmission pour fédérer les équipes et passer le relais auprès de nos jeunes soucieux de rejoindre le monde du spa.

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