L’embauche de freelances dans les spas : règles, risques et bonnes pratiques.

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L’embauche de freelances dans les spas : règles, risques et bonnes pratiques


Spa-A s’est rapproché de Maitre Julien-Alexandre DUBOIS, avocat spécialisé en droit du travail, du cabinet OSBORNE CLARKE, que nous remercions du temps accordé et des conseils qu’il nous a donnés lors de cette consultation.

Le recours aux travailleurs indépendants connaît un essor significatif dans le secteur des spas. Cette habitude, parfois perçue comme indispensable, génère cependant des questions juridiques importantes pour les employeurs comme pour les freelances.

Distinguer freelance et salarié

Les critères de l’indépendance véritable

Un freelance se caractérise par son autonomie professionnelle. Il détermine librement ses horaires, ses méthodes de travail, fixe le montant de ses honoraires et peut refuser des missions. Il dispose de sa propre clientèle en complément de la clientèle pour laquelle un spa peut lui demander d’intervenir, facture ses prestations et assume les risques financiers de son activité.

À l’inverse, un salarié est placé sous l’autorité de son employeur qui définit ses horaires, lui impose des méthodes de travail précises, exerce un contrôle sur l’exécution de ses tâches et lui verse un salaire fixe quelle que soit l’activité du spa.

Cette distinction est fondamentale car elle détermine l’ensemble des droits et obligations de chacun.

Le statut juridique du freelance

En France, le travailleur indépendant exerçant dans un spa peut adopter différents statuts : micro-entrepreneur (auto-entrepreneur), entreprise individuelle, ou société (SASU, EURL). Chaque statut implique des obligations fiscales et sociales spécifiques. Le freelance doit s’immatriculer, tenir une comptabilité, émettre des factures conformes, déclarer ses revenus et payer ses cotisations, charges et impots.

Les obligations pour les employeurs de spas

Vérifications préalables indispensables

Avant de collaborer avec un freelance, le spa doit s’assurer de la régularité de sa situation. Cela implique de vérifier son immatriculation professionnelle, la validité de son assurance responsabilité civile professionnelle, et ses qualifications et diplomes obligatoires pour les soins proposés. Ces documents doivent être conservés et mis à jour au moins chaque année.

La contractualisation de la relation

Un contrat de prestation de services, clair et détaillé, protège les deux parties. Il doit préciser la nature des prestations, les modalités de rémunération sous la mention “honoraires”, les conditions d’intervention, préciser les modalités de cessation de collaboration et surtout garantir l’indépendance du prestataire. Le contrat doit éviter toute formulation qui pourrait suggérer un lien de subordination. Il faudra également s’assurer que le freelance ne puisse pas détourner la clientèle du spa, en précisant bien que cela mettrait un terme à la mission.

La fiscalité pour l’employeur

Le spa qui fait appel à des freelances n’a pas à gérer les cotisations sociales des freelances, contrairement à un employeur classique. Cependant, il doit conserver les factures d’honoraires émises par les prestataires.

 

Les risques pour les employeurs de freelances

Le requalification en contrat de travail

 

C’est le risque principal.

Si l’administration ou un tribunal estime qu’un faisceau de liens de subordination existe malgré le contrat de prestation, la relation peut être requalifiée en contrat de travail en CDI à temps plein.

Les conséquences sont lourdes : paiement rétroactif des cotisations sociales avec majorations, indemnités de licenciement, salaires complémentaires rétroactifs et paiement des congés payés, dommages et intérêts, le tout sur une période de 3 ans. Il peut même y avoir des sanctions pénales pour travail dissimulé.

Les indices qui alertent l’administration sont : l’imposition d’horaires fixes, la fourniture exclusive de matériel par le spa, l’interdiction de travailler pour d’autres établissements, le contrôle quotidien du travail, la participation à des réunions avec les salariés ou encore l’intégration complète dans l’organisation du spa. Par exemple, les noms de vos freelances ne doivent pas apparaitre sur les plannings.

La majorité des redressements et condannations proviennent de dénonciations, soit de la part des frelances avec lesquels le spa décide de cesser toute collaboration et parfois de salariés licenciés qui souhaitent nuire à leur ancienne entreprise.

Les risques en matière d’assurance et de responsabilité

Si un client subit un préjudice lors d’un soin réalisé par un freelance, pas ou mal assuré, le spa peut être recherché en responsabilité. Une vérification rigoureuse des assurances professionnelles des prestataires est donc impérative.

Les risques sanitaires et réglementaires

Le spa reste responsable de la conformité des prestations délivrées dans ses locaux selon les  normes d’hygiène et de sécurité. Si un freelance ne respecte pas ces normes, l’établissement peut être sanctionné lors d’un contrôle.

 

Les risques pour les freelances

La dépendance économique

Un freelance qui travaille exclusivement ou quasi-exclusivement pour un seul spa se trouve dans une situation de fragilité. Cette dépendance peut être interprétée comme un indice de salariat déguisé, mais elle expose surtout le travailleur à une précarité financière en cas de rupture brutale de la collaboration.

L’absence de protection sociale

Contrairement aux salariés, les travailleurs indépendants ne bénéficient pas de l’assurance chômage classique, ont une protection sociale moins favorable en cas de maladie, et doivent constituer eux-mêmes leur retraite. Ces coûts sont intégralement à leur charge et doivent être anticipés dans leurs tarifs et leurs choix de statut juridique.

Les risques de requalification

Si la relation est requalifiée en salariat, le freelance peut perdre son statut d’indépendant et se retrouver dans une situation complexe, notamment s’il travaillait pour plusieurs clients. La requalification peut également entraîner des régularisations fiscales et sociales pénalisantes pour le freelance qui sera alors imposé à nouveau.

 

Quelques solutions pour sécuriser la collaboration de freelances

 

Pour les employeurs de spas

Garantir l’autonomie réelle du prestataire : Le freelance doit pouvoir organiser librement son temps de travail, choisir ses méthodes, et ne pas être soumis à un contrôle hiérarchique. Il peut proposer ses disponibilités mais ne doit pas se voir imposer un planning rigide.

Diversifier les sources de prestation : Encourager et vous assurer régulièrement que le freelance travaille pour d’autres établissements que le vôtre et donc éviter de lui demander d’être trop présent.

Rédiger un contrat solide : Faire appel à un cabinet d’avocats spécialisés en droit du travail, tel que le cabinet Osborne Clarke, pour élaborer un contrat de prestation conforme est un investissement judicieux. Le contrat doit mentionner explicitement l’absence de lien de subordination.

Mettre en place une facturation claire : Les prestations doivent faire l’objet de factures détaillées émises par le freelance, avec mention de son statut et de son immatriculation RCS.

Séparer les espaces et équipements : Dans l’idéal, le freelance utilise son propre matériel, bien évidement cela est rarement possible. Il conviendra donc de préciser dans le contrat que des équipements adaptés au bien-être des clients et des praticiennes sera mis à disposition pour des raisons d’hygiène et de sécurité.

Former et sensibiliser les équipes : Les managers et responsables doivent comprendre la différence entre gérer un salarié et faire intervenir un prestataire indépendant. Des formations spécifiques sont proposées par le cabinet de Maître DUBOIS auprès de qui Spa A a réalisé cette consultation.

 

Pour les freelances

Développer une clientèle diversifiée : Travailler pour plusieurs spas ou avoir sa propre clientèle en parallèle renforce l’indépendance et la sécurité financière.

Négocier ses propres tarifs : Les honoraires doivent être déterminés par le freelance en fonction de ses coûts et de sa stratégie commerciale. C’est le spa qui devra accepter, ou pas, les montants des honoraires proposés par les freelances.

Souscrire les assurances adaptées : Une responsabilité civile professionnelle est indispensable, ainsi qu’une protection juridique et, idéalement, une prévoyance complémentaire.

Tenir sa comptabilité : Conserver tous les justificatifs, émettre des factures conformes, et respecter ses obligations déclaratives évite les problèmes avec l’administration.

Négocier des contrats équilibrés : Ne pas hésiter à faire relire les contrats de prestation par un professionnel avant signature.

 

 

D’autres modèles à explorer

Le portage salarial : Cette solution permet au praticien de rester indépendant dans son activité commerciale tout en bénéficiant du statut de salarié pour la protection sociale. Une société de portage facture le spa et reverse un salaire au praticien. Cette solution est cependant très onéreuse pour les freelances et elle ne convient que dans le cadre d’une collaboration avec une société (elle exclut la relation avec une clientèle de particuliers)

La location de cabine : Le spa peut proposer à des praticiens indépendants de louer un espace dédié. Cette formule clarifie la relation et l’indépendance, mais nécessite un bail commercial en bonne et due forme avec un risque important pour le propriétaire des locaux du spa.

La collaboration entre spas et freelances peut être source de flexibilité et d’enrichissement mutuel, à condition de respecter scrupuleusement le cadre légal. La frontière entre prestation indépendante et salariat déguisé est étroitement surveillée par les autorités, et les sanctions en cas de non-conformité sont dissuasives.

La solution réside dans l’authenticité de la relation d’indépendance. Un spa qui impose trop de contraintes devrait réfléchir à proposer des contrats en CDI ou en CDD (ou contrats saisonniers) plutôt que de risquer une requalification coûteuse.

En cas de doute, la consultation d’un avocat spécialisé en droit du travail connaissant le secteur permet de sécuriser les pratiques et d’éviter des complications futures.

Nous vous invitons, si vous le souhaitez, à nous faire parvenir toutes les questions que vous pourriez encore vous poser (nous contacter). Nous vous répondrons dans la mesure de nos connaissances. Pour plus d’aide, n’hésitez pas à consulter Maître DUBOIS de la part de Spa-A.

 

Propos recueillis par Cécile Trouiller (Spa & Hospitality Consultante) pour la Commissions des Spa Managers de Spa-A.

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Maître DUBOIS du cabinet Osborne Clarke

    

Images générées par de l’IA.

Marie_Paule Leblanc_Péru

Présidente bénévole Spa-A. — Un parcours de plus de 35 ans à la direction internationale de produits cosmétiques et hôtellerie, dans le développement commercial et marketing. Shiseido, Yves Saint-Laurent, Dior, Thierry Mugler, Clarins, Pure Altitude et le groupe SIBUET ont marqué mon appétence pour le luxe et l'authenticité, en France comme à l'international. Executive Coach formé HEC, pour mettre l'humain au coeur des métiers. Désormais dans la transmission pour fédérer les équipes et passer le relais auprès de nos jeunes soucieux de rejoindre le monde du spa.

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